Dans une interview croisée accorée à franceinfo, Clément Turpin et Romain Poite, arbitres français références dans les domaines du football et du rugby se sont exprimés sur leur profession. L’un des protagonistes de l’ombre du football français revient sur ce qu’il considère comme un problème avec le respect accordé aux arbitres et donne son avis sur l’usage de l’assistance vidéo. Ces deux sports doivent-ils s’inspirer l’un de l’autre ?
Celui qui est au sifflet de bien des matchs en Ligue 1, en Ligue des Champions, mais aussi dans toutes sortes de compétition internationales depuis plusieurs années s’est longuement entretenu au sujet de la VAR, élément extrêmement polémique depuis son introduction dans le football. Clément Turpin dresse tout d’abord, un constat positif quant à cet outil : « Grâce à la vidéo, on a diminué de manière sensible les erreurs importantes. Aujourd’hui, on est environ à 75 % d'erreurs importantes qui ont pu être corrigées grâce à l'outil vidéo. L'efficacité et l'intérêt de la VAR ne sont plus à démontrer, mais on doit encore travailler sur la méthode d'utilisation et la communication auprès du grand public et des acteurs. »
C’est en effet un premier problème souvent pointé du doigt par différents acteurs autour des matchs, notamment les supporters. Que disent les arbitres lorsqu’ils doivent prendre une décision ? Que voient-ils au moment où nous attendons devant notre télévision ? À ce propos, la question de l’ouverture des micros des arbitres se pose pour le football, déjà mise en place au rugby. À ce sujet, Turpin est mitigé : « Les discussions sur ce sujet sont intenses en ce moment dans le milieu du football, et on essaie de peser le pour et le contre. Je suis convaincu que l'ouverture des micros n’est pas la solution miracle. »
À chaque angle de vue il y a une vérité.
Clément Turpin
Bien souvent, la question de l’exactitude parfois trop poussée de la VAR est remise en cause. La question de l’angle de vue, de l’image choisie, ne fait jamais l’unanité malgré la vidéo. Clément Turpin semble abonder dans ce sens : « à chaque angle de vue il y a une vérité, une perception de la situation qui peut être différente. Ainsi, c'est toute l'expertise des arbitres et des arbitres vidéo qui va s’exprimer. Ce sont eux qui vont sélectionner les bons angles pour arriver à la décision la plus juste. »
Enfin, la question du respect envers l’arbitre et ses décisions n’ont pas été esquivées par celui qui est au sifflet chaque week-end sur les pelouses de France. Il se dit usé de ce climat permanent de défiance régnant dans son sport : « quand je vois une explication qui est donnée par un arbitre de rugby, qui fait 1m75, et le joueur en face, qui fait quasiment deux mètres, et qui l'écoute presque religieusement, avec beaucoup de respect, qui accepte la décision et retourne se placer sans rien dire. Pour nous les arbitres de football, quand on voit ces images, on se dit "wow c'est juste incroyable". » avant d’ajouter, toujours en considération du rugby : « Je suis assez admiratif des collègues du rugby et de leur capacité à créer les conditions de respect et celles de l'acceptation de la décision par un relationnel posé à la fois, sur la fermeté et l'autorité ».
Alors, le football doit-il s’inspirer du rugby dans la manière de communiquer ? Doit-il trouver ses propres manières d’ouvrir la discussion ? Ou l’arbitrage est-il voué à être source de discorde, à l’image du battage médiatique en Espagne depuis hier soir et la polémique autour du match Levante - Atlético ?