AS Saint-Étienne : Une politique de formation infructueuse ?

L’ASSE a la formation dans le sang. Club attaché à sa tradition d’emmener les jeunes Stéphanois vers le haut niveau en passant par l’équipe première tôt dans leur parcours, cet héritage se ressent dans les statistiques vis-à-vis des autres clubs européens. À une époque où la perte d’identité des clubs est au cœur de certains débats, les Verts restent fidèles à leurs principes mais est-ce efficace ? Ne s’imposent-ils pas un plafond de verre en termes de performances ?

Illustration : "AS Saint-Étienne : Une politique de formation infructueuse ?"

Le CIES a rendu publique ce lundi, une liste permettant de classer les meilleurs clubs formateurs à travers le monde. Avec 33 joueurs formés à l’ASSE évoluant actuellement en Europe, le club 10 fois champion de France se classe 5e meilleur club de Ligue 1 dans le domaine derrière Lyon, Paris, Rennes et Monaco. Saint-Étienne est également le 6e club européen qui fournit le plus les équipes du Big 5. Seuls le FC Barcelone et le Real Madrid devancent les cinq clubs français cités. 16e au classement CIES du training index, permettant de pondérer le nombre de joueurs avec la qualité des clubs dans lesquels ils évoluent, l’ASSE s’impose comme un meilleur formateur que Manchester United, Benfica, l’Atlético de Madrid ou encore le Bayern Munich entre autres.

La formation au cœur du projet actuel

Dans l’effectif professionnel de l’ASSE, pas moins de dix joueurs ont été directement formés au club. Cela représente près de 40% du groupe professionnel dans son intégralité. Âgés de 18 à 23 ans, certains occupent même un poste de titulaire dans l’équipe à l’image du Franco-Britannique Étienne Green dans les buts à tout juste 21 ans, ou encore Mahdi Camara, 23 ans, milieu de terrain de grand talent.

Cette équipe construite autour de ses jeunes est entretenue à l’image du projet tout entier, par l’entraîneur de cette équipe. Claude Puel est en effet connu et reconnu pour donner leur chance aux jeunes et les intégrer pleinement, sans réserve de confiance. La direction a d’ores et déjà réitéré ce choix fort de le conserver pour cette raison bien précise entre autres :

J’ai l'intime conviction qu'il est actuellement la personne idoine au poste d'entraîneur des Verts. Son projet représentait la meilleure alternative possible pour faire avancer le club. À savoir, faire jouer et progresser les jeunes dans le but d'aider l'AS Saint-Étienne à se constituer de nouveaux actifs. Le développement du joueur est sa principale philosophie, sa raison d'être. En cela on ne peut que se réjouir du travail accompli.

Jean-François Soucasse - président exécutif de l’ASSE

Une limite en termes de résultats ?

Si l’identité profonde du club est respectée avec Puel à sa tête, la question des résultats se pose. Arrivé en 2019, le coach des Verts a mené les siens à la 17e position en 2020, à la 11e place en 2021, pour aujourd’hui, se classer 20e et dernier, véritablement en danger de relégation en fin de saison. Après 11 journées aux allures de catastrophe, les Stéphanois semblent sans solution et cela n’aide pas les jeunes à se développer. Le projet de jeu manque, la confiance est au plus bas et les doutes subsistent match après match.

Des jeunes partis trop tôt ?

Lorsque l’on observe cette lente descente aux enfers du côté du stade Geoffroy-Guichard, il est impossible de ne pas penser aux jeunes talents partis récemment du club qui brillent aujourd’hui dans d’autres formations. Wesley Fofana, défenseur central de 20 ans en pleine forme avec Leicester avant de se blesser gravement en début de saison, aurait-il pu être conservé une année supplémentaire ? Un prêt aurait-il pu être négocié pour lui permettre de passer le relai dans sa progression ? Quid de William Saliba, parti à Arsenal, passé par Nice et maintenant Marseille, concurrent direct de Ligue 1 ? Ces deux dossiers sont distincts mais posent question quant à la finalité de la formation de ces jeunes qui n’ont pas représenté des opportunités majeures par la suite.

Une équipe en manque de leaders ?

L’extrême jeunesse de cette équipe est visiblement voulue et assumée. Mais cela ne serait-il pas un problème dans la gestion d’une saison, qui demande calme et expérience. L’expérience justement est aujourd’hui incarnée par les quatre seuls trentenaires de l’équipe : Timothée Kolodziejczak (30 ans), Gabriel Silva (30 ans), Ryad Boudebouz (31 ans), et Wahbi Khazri (30 ans). Ce manque de joueurs habitués au haut niveau et aux saisons longues, parfois difficiles, est-il un problème pour le club ? Le fait est que cette année, la réaction ne vient pas et les problèmes semblent loin d’être résolus.

Alors Claude Puel, conservé pour sa philosophie d’intégration des jeunes et sa complémentarité avec le projet des Verts, doit-il être remplacé ? Un nouveau coach permettrait-il une réorientation de la politique du club, de manière à lui permettre de se sauver au court terme malgré sa vision plus longue durée ? La question se posera rapidement, notamment en termes de recrutement, où de nombreux joueurs d’expérience vont se retrouver libres de tout contrat sur le marché des transferts et où les opportunités ne manqueront pas. La Ligue 2 ne serait certainement pas suffisamment attractive et la réaction doit intervenir vite pour ne pas fragiliser ce club emblématique du championnat de France.